jeudi 19 décembre 2013

Journal Intime, bien connu à Junas, par Citizen Jazz, Philippe Méziat




Studio Konzert

Journal Intime

Sylvain Bardiau (tp), Frédéric Gastard (bass-sax), Matthias Mahler (tb), special guests : Marc Ducret (g), Vincent Peirani (acc)
Attention : disque vinyle ! En édition limitée !! Et « flat edge » !!! Ah, je vois qu’on tique un peu sur ce dernier terme. Ça veut dire « bord plat », c’est à dire que le disque, au lieu d’être coupant dans sa circonférence, là où l’on met les doigts pour le tenir, offre une petite surface plane et non coupante tellement le disque est épais. Les premiers « Blue Note » étaient ainsi, et puis assez vite on a réduit le grammage du vinyle et les bords sont devenus fins - donc tranchants. D’où, chez les échangeurs de vinyles, l’habitude de faire les paquets en séparant disque et pochette, sinon, pendant le transport, on risque d’abîmer sa précieuse couverture et d’en fendre les bords. Fin (provisoire) de l’épisode « tout ce que vous avez voulu savoir sur les disques vinyles et qu’on ne vous a jamais dit parce que les secrets de ce genre, ça ne s’ébruite pas ».
Sinon quoi ? Vous serez peut-être surpris de voir, sur la pochette, la tête de nos joyeux et brillants musiciens, ce qui n’est guère dans leurs habitudes. Rassurez-vous : le CD qui sort parallèlement respecte, quant à lui, la tradition de ce trio, et on envisage même, s’il y a retirage du LP, de lui substituer un autre design. Collectionneurs, aux aguets ! En l’occurrence, les producteurs du vinyle (le label Neuklang) ont été si généreux [1] que ses membres ont été autorisés à choisir l’habillage de leur « gatefold cover » (pochette ouvrante), avec photos en couleur et portraits rapprochés. Et d’ailleurs, pourquoi pas ? Au dos, toutes les informations sur la séance, place des instruments, identification des micros, de la console, du magnétophone à bande analogique. Car attention : ceci n’est pas un vinyle réalisé après coup à partir de fichiers numériques ! C’est un véritable disque noir, enregistré et pressé dans les conditions de l’époque (AAA). Ce triple A est probablement un clin d’œil, une plaisanterie. Et en plus, elle est drôle. « Journal Intime » en triple A, mais c’est bien sûr... Je propose désormais, au lieu des « chocs », « élus » et autres « zémois », la notation en triple lettres, avec des plus et des moins. Ça ira plus vite, et nos lecteurs seront informés avec précision. « Ce mois-ci », dira-t-on, « Keith Jarrett a perdu son triple A pour être rétrogradé en AA- », ou encore, « Vincent Peirani obtient un triple A renforcé ».
Bon, à propos de Vincent Peirani, sachez qu’il est arrivé dans le studio Bauer dix minutes après le début du concert (probablement un avion en retard), et comme Marc Ducret et lui ne s’étaient jamais rencontrés sur ce programme, son inscription dans le concert a été du genre funambulesque. Car vous devez savoir aussi que ce disque provient du « concert en studio » du 17 février 2013, dans les conditions du direct absolu, qui servait en quelque sorte de répétition générale à l’enregistrement du CD, réalisé lui les 18, 19 et 20 février. Sorti avec quand même deux petits morceaux du « live » ! Tous ces détails, nous les devons à Sylvain Bardiau, intarissable sur le sujet. Par ailleurs, « Orage à tonnerre » (allusion au Chablis récolté sur cette commune ?) dure 10:08 sur le LP et plus de 17:00 sur le CD (en trois parties), « Chroïd » est en trois parties dans les deux cas avec une durée supérieure sur le vinyle (22:09 contre 18:21), et « Les 38 lunes » n’est joué dans sa totalité que sur le CD. Pas de problème : il faut avoir les deux !
J’écoute en boucle « Orage à Tonnerre » (version LP) et je me régale de tant de musique, construite à partir de riffs, de courtes séquences, Frédéric Gastard sachant déduire d’un énoncé simple toutes les conséquences complexes qu’il contient. Le solo de Marc Ducret est de ceux qu’on aime, Mathias Mahler est d’une présence hallucinante. Du coup, Les 38 lunes sont comme un ciel de traîne. Et Sylvain Bardiau, sur tout le début de « Chroïd », me fait penser à la façon dont Lester Bowie savait rendre vivante la façon de jouer des grands anciens, tout en les subvertissant. Je vais de ce pas écouter le CD, qui sera également chroniqué dans ces colonnes, sous une autre plume.
(Disque écouté sur une chaîne hi-fi banale, mais avec une platine Thorens TD 124, tête de lecture banale Shure M 44 MC.)
[1C’est la première fois dans l’histoire du trio qu’un producteur assume entièrement seul la production du disque !

http://www.citizenjazz.com/Journal-Intime-3469560.html
par Philippe Méziat // Publié le 9 déce

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